Sirène d'Antioche

 

Il t'en souvenait toujours, ce jour de brume

Où sur le rocher d'Antioche, elle apparut.

Belle comme un dauphin jouant avec l'écume

Les cheveux d'or tombant sur son torse nu.

Ses yeux d'aigue marine sur toi se posèrent

Jeune pêcheur de tourteaux de Chassiron

Son doux sourire, ses seins, ses hanches te troublèrent

Tant et tant qu'ils devinrent une obsession.

De manger, dormir il n'était plus question

Et consultas donc la sorcière de la Brée

Tu lui dis ton tourment et ta décision

De tenter de la séduire et l'enlever.

L'oracle hésitante, confia à l'amoureux

Comment capturer la nymphe, belle des mers,

Par surprise, lui attraper ses cheveux

La bloquant ferme et faire prisonnière.

Ainsi fut fait, et l'attirance réciproque

La noce eut lieu dont le village se souvient

De ces épousailles complètement baroques

D'une sirène et de son jeune marin.

Le bonheur: une chaumière ils achetèrent

Puis une barque pour aller pêcher en mer

Et de plus un matelot ils embauchèrent

Et un jeune moussaillon pour faire la paire.

La vie était belle , la mariée si heureuse

Comme le bon sort pour son charmant amant

La semi déesse étant en cela généreuse

Reniant sa provenance de l'océan

Les dieux de la mer alors s'impatientèrent.

Un rêve prémonitoire un jour sur le pont

Précéda trois vagues qui soudain déferlèrent

Tentant de verser la frêle embarcation.

Le jeune et habile marin les deux premières

Il put contrer puis la troisième il affronta.

Habitée d'un dragon, rouge et sanguinaire

Conjugant toutes ses forces il l'harponna.

Fatigué mais fier, à terre il retournait

Devant sa chaumière une foule assistait

Son épouse au sol, qui blanche reposait

Un harpon sanglant, sa gorge déchirait.

Au bout de la nuit la nymphe s'éteignit

Et l'homme pleura, implora, éperdu

Les semaines passèrent plus de goût à la vie

Il s'étiolat, ne mangea plus et mourut.

Cinq siècles passèrent : dans la commune de Saint-Denis-d'Oléron on ouvrit une tombe.

Elle abritait les restes d'un homme et d'un dauphin.

     Fable écrite par Gérard Dézèmerie  (Mars 2020) inspirée d'un conte “La sirène d'Antioche” paru dans l'ouvrage de Robert Colle .Edition 4ème trim. 1975 .